Avec l'amiral Lacoste, les méthodes militaires au service de nos entreprises
Pierre Lacoste, ancien patron des services secrets, limogé après l'affaire du Rainbow Warrior en 1985.
| ESPIONNAGE |L'amiral
Pierre Lacoste, 84 ans, était de retour à Lens, vendredi soir, pour une
conférence sur le renseignement militaire appliqué à l'intelligence
économique. En matière d'espionnage ou de protection des sources, les
techniques de guerre s'appliquent parfaitement aux places financières.
Un amiral à Lens. L'invitation lui avait été
faite par Guy Delcourt, en septembre 2007, lorsque l'ancien chef de la
Direction générale de la sécurité extérieure (DGSE) vint élever
Paul-Gilbert Comble, bien connu à Lens, au grade d'officier dans
l'Ordre national du mérite. Le maire a été marqué par «
la sincérité et le code de l'honneur »
de ce soldat de haut rang (le plus haut) qui fut limogé de son poste,
en 1985, en pleine affaire du Rainbow Warrior, ce navire de Greenpeace
coulé dans le port d'Auckland par les services secrets français.
Depuis son évasion du Maroc en 1943, Pierre Lacoste a connu une carrière militaire riche (
lire ci-dessous)
et a soutenu, très vite, l'art du renseignement comme pilier des
victoires militaires. Le dernier exemple en date, les dix soldats
français tués en août en Afghanistan, ne fait que conforter sa thèse :
«
Les talibans sont cent fois mieux renseignés sur les forces
alliées. Nous, nous ne parlons même pas le pachtoum ! C'était la même
chose le 11 septembre 2001 quand d'énormes machineries de guerre n'ont
pas réussi à prendre en défaut une poignée de moudjahidins. »
Les méthodes sont vieilles comme le monde, seule la technique a évolué
: « On retrouve dans la cyber war, la guerre informatique, des formules
qui remontent à l'Antiquité comme le cheval de Troie. Rien de neuf sous
le soleil !
»
L'oreille de l'indien Comme l'indien plaquait son
oreille au sol pour écouter les pas des chevaux ennemis, les radars et
autres visions nocturnes remplissent aujourd'hui l'office du
renseignement. Pierre Lacoste parle de Bismarck qui, en 1870, savait
tout des routes et des populations, «
jusqu'à la servante du café du coin »,
qui allaient permettre aux Prussiens de prendre l'Alsace-Lorraine. De
ce Winston Churchill « nourri de la culture du renseignement » dès ses
premiers pas de journaliste en Afrique du Sud (guerre des Boers). De
Gaulle, lui, ne fut même pas au courant des dates des débarquements en
Afrique du Nord puis en Normandie.
L'application de ces méthodes militaires dans l'intelligence
économique relève d'un concept encore relativement neuf, qui peine à
percer dans une culture française pas vraiment portée sur l'espionnage.
Pierre Lacoste est un militant du renseignement pour la bonne et simple
raison que «
l'argent, de tout temps, a été le nerf de la guerre. »
En dix ans, le président américain Clinton aura ainsi augmenté
sensiblement la richesse de son pays en utilisant ces armes : «
Le FBI et la CIA se sont mis au service de la conquête des marchés. »
Comme les armées, les entreprises ont besoin d'informations utiles, de
connaître et de tromper l'adversaire, de se protéger des attaques. Les
espions ont infiltré la sphère économique. Reste à savoir quels États
mettront le mieux les méthodes militaires au service de leurs
entreprises et comment celles-ci pourront s'en inspirer. •