Au cours des combats de Nghia-Lo, des cadres du 2e BEP (Bataillon Etranger de Parachutistes) progressent dans la rivière Nam-Minh. Au premier plan, le capitaine Coat (qui sera tué le 15 octobre 1951), vétu de la peu fréquente combinaison camouflée US M42. Le deuxième légionnaire porte un calot d'infanterie de la Légion Etrangère (vert à fond rouge) consideré comme coiffe de repos, à la place du béret vert porté depuis 1949. Cette pratique cessera en 1952 avec l'adoption définitive du béret vert.
La ville de Nghia Lo est située à 150 km d'Hanoi, et abrite à l'époque quelques 30.000 habitants. Elle est située dans une cuvette entourée par des collines et montagnes pouvant s'élever jusqu'à 1500m. Elle est reliée à Hanoï par la Route Coloniale 13 ( RC13) et possède un aérodrome.
La défense de la ville est quant à elle assurée par un ensemble de postes aux nombres de 5. Trois des postes sont défendus par le 1er Bataillon Thaï et sont situés aux abords de la ville. Les deux autres sont défendus par des partisans plus loin au nord et à l'est de la ville pour servir de "sonnette" (c'est à dire d'alarme au cas où l'ennemi s'approcherait de la ville).
Prémices de la Bataille
Le général Giap, souhaitant reprendre l'offensive, envoie la Division d'infanterie 312 (l'une des plus connues et redoutées de ce conflit) en direction de la ville de Nghia Lo, à la fin du mois de septembre après la saison des pluies.
Le 28 septembre, la division 312 est découverte à 10km au nord de Nghia Lo aux abords du poste de Sai Luong. Ses occupants sont évacués directement après quelques accrochages. Le scénario se répète le 30 septembre lorsque que 3 régiments vietminh sont repérés aux abords de la ville. Cette fois-ci, c'est le deuxième poste « sonnette » qui se replie après quelques combats.
Puis, tout s’accélère le lendemain. Le poste de Ban Tu (situé à 5 Km) défendu par une partie du 1er Bataillon Thaï est pris, c'est le début de la bataille...
Opération Rémy
Le Général Salan, dirigeant les forces françaises et les opérations dans le Tonkin pendant l'absence du Général de Lattre de Tassigny, décida de monter une vaste opération de parachutage sur les arrières Vietminh pour contrer l'offensive sur la ville de Nghia Lo. Le 2 octobre, le 8e Bataillon de Parachutistes Coloniaux (BPC) est parachuté à 20km au nord de la ville dans l'espoir de prendre à revers l'adversaire et ainsi de soulager les défenseurs de la ville. C'est ainsi que 400 hommes commandés par le capitaine Gautier sont parachutés dans la jungle du Tonkin.
Le lendemain à 4h l'attaque commence sur la ville. 3 heures après, l'assaut cesse. Mais au même moment c'est au tour du poste de Son Buc situé sur les hauteurs de la ville de se faire attaquer. le poste devra se défendre pendant 21 heures face aux assauts incessants des Bo-doï.
La 16eme compagnie du 8e BPC est quant à elle durement accrochée à 8h30 et doit se replier. Cela oblige le capitaine Gautier à prendre position sur des hauteurs entre le TD209 (Régiment de l'armée populaire vietnamienne) et Nghia Lo.
Opération Thérèse
Devant la situation désespérée de la ville de Nghia Lo et la situation critique du 8e BPC, l'Etat Major décide de mettre en place une nouvelle opération pour dégager la situation, l'opération Thérèse.
C'est maintenant au tour du 2eme Bataillon Etranger Parachutiste (BEP), dirigé par le Capitaine Raffalli, de sauter dans l'enfer de la jungle, le 4 octobre. Leurs ordres sont de rejoindre le 8e BPC pour renforcer le rapport de force sur les arrières vietnamiens, ce groupement sera mis sous les ordres du colonel Rocquigny.
Au soir du 4 octobre, trois compagnies du 2eme BEP ont rejoint le 8e BPC tout en ramenant de nombreuses informations sur les positions et les forces vietminh.
Le 5 octobre, Nghia Lo subit une nouvelle attaque qui sera repoussée après 3 heures d'âpres combats.
Le 2eme BEP est lui redirigé vers Bac-Co à environs une dizaine de kilomètres de leur actuelle position. Il faudra près de 9 heures aux hommes du 2e BEP pour accomplir cette marche dans la jungle, malgré le fait qu'ils n'aient pas emporté avec eux leurs armements lourds.
Le 6 octobre, c'est au tour du 8e BPC de reprendre la marche pour rejoindre le 2e BEP qui durant toute l'après midi passe à l'assaut et repousse tous les vietnamiens des positions dominantes aux abords du PC du Capitaine Raffalli. Mais cela n'est pas sans compter la détermination des bataillons d'élites de la division 312 qui passe toute la soirée et la nuit à contre attaquer en enchaînant les assauts sur le 2e BEP. Les munitions commencent à manquer, c'est au tour des poignards, des baïonnettes et des poings de répandre le sang dans la boue de la jungle vietnamienne.
Pendant ce temps là, le 10e bataillon parachutiste de chasseurs à pied est parachuté sur Nghia Lo.
Le 7 octobre à 4h du matin, le 2e BEP doit se replier après avoir subit de lourdes pertes. Le capitaine Raffalli décide de décrocher et de rejoindre le 8e BCP. Une demi-heure plus tard le 2e BEP est en marche. Malgré tout, ils ne réussirent qu'à établir un bref contact avec le 8e BEP et au moment venu celui-ci n'est pas au rendez vous. Ils devront alors continuer à marcher pour échapper à leur poursuivant au point de devoir laisser une section se sacrifier pour retarder l'ennemi.
Le 8 octobre, Son Buc, le fortin situé à coté de Nghia Loh, est de nouveau attaqué durant trois heures en pleine nuit. Au même moment, le 2e BEP rejoint enfin le 8e BCP. Son Buc est attaqué pendant 3 heures dans la nuit du 8 au 9.
Le 10 octobre après l'échec de la division 312 à prendre Nghia Lo et à repousser les parachutistes, l'ordre est donné de se replier. C'est la fin de la bataille.
Bilan
Une victoire française rendant l'utilisation des parachutistes et de l'aviation un modèle du genre. Les pertes françaises sont estimées à 36 morts, 96 blessés et 163 disparus.
Du coté vietnamien, les pertes sont estimer à plus d'un millier de morts et plus de 2500 blessés. Cela représente un échec considérable et l'impossibilité de continuer la campagne qui venait à peine de se lancer. C'est donc un coup dur au moral vietnamien qui n'a pas été capable de battre les français lors d'une campagne « conventionnelle » mais qui n'empêchera l'armée populaire de continuer son harcèlement des lignes de communications françaises dans le Tonkin.
Opération dans la région de Nghia Lo, avec le 8e BPC et le 2e BEP
Description de la photo : Le lieutenant-colonel de Rocquigny, commandant le groupe opérationnel formé par le 8e BPC (Bataillon de Parachutistes Coloniaux ) et le 2e BEP (Bataillon Etranger de Parachutistes) et le chef d'escadrons Raffalli, commandant le 2e BEP, se recueillent sur la tombe d'un légionnaire tombé au cours des combats de Nghia-Lo.